L'assurance de votre copropriété : les aléas de l'article 1074.2 C.c.Q.
Le projet de loi 141 (articles 636 à 653)
En 2018, les règles régissant l’assurance de votre copropriété ont été largement révisées suite à l’adoption du projet de loi 141.
Cette révision était inspirée des travaux de comités dédiés à la réforme de l’assurance en copropriété divise au Québec depuis 2011, et plus particulièrement par la nécessité de revoir les modalités de partage entre les assureurs des copropriétaires (pour leurs unités privatives) et ceux du syndicat (pour les parties communes).
Notamment, ce projet de loi prévoit la création d’un fonds d’auto-assurance destiné à permettre au syndicat de payer à court terme la franchise prévue à sa police d’assurance en cas de sinistre, qui peut être parfois élevée et inciter le syndicat à retarder les travaux correctifs. Certaines mesures importantes mises de l’avant dans le projet de loi 141 sont graduellement entrées en vigueur en 2020 après l’adoption des règlements nécessaires par le gouvernement.
L’article 1074.2 du Code civil du Québec
D’autres mesures sont entrées en vigueur dès le 13 décembre 2018, telle que celles prévues à l’article 1074.2 C.c.Q.
Cet article précise que les montants engagés par le syndicat pour réparer les dommages suite à un sinistre doivent être cotisés auprès de tous les copropriétaires (mettant ainsi fin aux ententes de répartition entre les assureurs, applicables aux seuls copropriétaires d’unités privatives endommagés par le sinistre). Il prévoit également que les montants non couverts par l’assurance du syndicat, tel que le paiement de la franchise, peuvent être recouvrés du copropriétaire fautif impliqué dans un sinistre :
1074.2 : Les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice occasionné aux biens dans lesquels celui-ci a un intérêt assurable ne peuvent être recouvrées des copropriétaires autrement que par leur contribution aux charges communes, sous réserve des dommages-intérêts qu’il peut obtenir du copropriétaire tenu de réparer le préjudice causé par sa faute.
Est réputée non écrite toute stipulation qui déroge aux dispositions du premier alinéa.
Depuis son adoption, la jurisprudence récente a appliqué l’article 1074.2 C.c.Q. dans quelques dossiers de sinistres - la plupart du temps des fuites d’eau impliquant des copropriétaires et leur syndicat.
Il appert que le recours du Syndicat contre un copropriétaire impliqué dans un sinistre sera plus difficile.
En effet, la seule garde du bien en cause dans le sinistre, en raison de son bris ou d’une défectuosité (baignoire, chauffe-eau, robinetterie, etc.) n’est pas suffisante pour engager la responsabilité de ce copropriétaire ou de son locataire : dans un contexte de louage, un jugement de la Cour d’appel du Québec a déterminé que la présomption de faute extracontractuelle en raison de la garde d’un bien (article 1465 C.c.Q.) ne s’appliquait pas entre un locateur et son locataire car leur relation est avant tout contractuelle, en vertu de leur contrat, soit le bail : par analogie, ce régime extracontractuel qui présume une faute en cas de sinistre lié à la garde d’un bien, ne s’appliquera donc pas à la relation contractuelle entre un copropriétaire et son syndicat, la déclaration de copropriété étant aussi un contrat.
Il sera donc important de vérifier que votre déclaration de copropriété contient une clause similaire à celle de l’article 1465 C.c.Q., ce qui facilitera tout recours entrepris par le syndicat contre un copropriétaire.
La modification subséquente de l’article 1074.2 C.c.Q.
Toutefois, le projet de loi 41, adopté le 17 mars 2020 vient alléger le fardeau du syndicat. L’article 1074.2 C.c.Q. ainsi modifié, précise que la responsabilité du copropriétaire est aussi engagée dans les cas de “préjudice causé par le fait ou la faute d’une autre personne ou par le fait des biens qu’il a sous sa garde”, mettant ainsi fin aux refus des assureurs d’indemniser les sinistres pour cette raison.
L’entrée en vigueur de cet article modifié permet donc au syndicat de votre copropriété de mieux faire valoir ses droits, au profit de l’ensemble des copropriétaires, à l’occasion des sinistres pouvant survenir dans les parties communes et les parties privatives de votre immeuble.
Les questions relatives au droit de la copropriété divise sont souvent complexes et elles doivent être discutées et analysées en détail avant d’envisager tout recours légal : nous serons heureux de vous assister et de vous rencontrer à cette fin.
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