Adoption du projet de loi 16 : modifications importantes applicables au syndicat de copropriété.
Le 5 décembre 2019, le projet de loi 16 était adopté par l’Assemblée nationale (et devenait la loi 28 des lois du Québec de 2019). Depuis l’entrée en vigueur des articles 24 à 63 de cette loi, le 10 janvier 2020 pour la plupart d’entre eux, un syndicat de copropriété doit dorénavant respecter une série d’obligations importantes.
En effet, le projet de loi 16 (Loi visant principalement l’encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l’amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d’habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal ) modifie substantiellement plusieurs articles du Code civil du Québec relatifs à la gestion de votre copropriété .
Le fonds de prévoyance et la conservation de l’immeuble
le syndicat devra tenir à jour un carnet d’entretien de l’immeuble et obtenir une étude du fonds de prévoyance établissant les sommes nécessaires pour que ce fonds soit suffisant afin de payer les réparations majeures et le remplacement des parties communes (articles 1070.2 et 1071 C.c.Q.). Cette étude doit être renouvelée tous les 5 ans ;
le syndicat doit établir la contribution annuelle des copropriétaires au fonds de prévoyance sur la base de cette étude (art. 1071 C.c.Q.). Cet effort, si nécessaire pour certaines copropriétés, dans la contribution du fonds de prévoyance devra commencer dans les 30 jours de l’assemblée annuelle des copropriétaires suivant l’obtention de l’étude du fonds de prévoyance. Le syndicat aura toutefois 10 années pour garnir le fonds de prévoyance à hauteur du montant prévu dans cette étude ;
le syndicat pourra utiliser le fonds de prévoyance sans autorisation de l’assemblée (art. 1071 C.c.Q.);
le syndicat doit tenir à jour une attestation sur l’état de ses finances et sur l’état de l’immeuble, et une copie doit être remise aux copropriétaires (1072.2 C.c.Q.);
le copropriétaire qui vend son unité doit remettre à l’acheteur cette attestation sur l’état des finances du syndicat et l’état de l’immeuble (art. 1068.1 C.c.Q.) : le syndicat devra donc lui fournir cette attestation et ne pas retarder la vente de son unité, ou la mettre en péril, puisqu’il s’agira d’une condition de sa promesse d’achat (1785 C.c.Q.);
le syndicat devra aussi fournir au promettant acheteur d’une unité privative des renseignements généraux concernant l’immeuble et le syndicat “qui sont de nature à lui permettre de donner un consentement éclairé” (art. 1068.2 C.c.Q.). Ces renseignements généraux incluront ceux déjà communiqués à l’acheteur en vertu de l’article 1069 C.c.Q., avant que la vente ait lieu : l’état de l’immeuble, les travaux prévus ou à prévoir, etc. Il est d’ailleurs prévu que le gouvernement aura le pouvoir de déterminer d’autres renseignements qui devront figurer dans la note d’information (1786 C.c.Q.) ou dans le contrat préliminaire d’achat ;
le syndicat pourra aussi obtenir de l’architecte et ingénieurs ayant participé à la construction de l’immeuble leurs plans (art. 1083.1 C.c.Q.).
Droits et recours nouveaux
D’autres ajouts, tout aussi importants, modifient les droits du conseil d’administration du syndicat et des copropriétaires :
le syndicat doit transmettre aux copropriétaires le procès-verbal de toute assemblée de copropriétaires qu’il tient ou toute résolution écrite qu’il adopte dans les réunions du conseil d’administration, dans les 30 jours de ceux-ci (articles 1068.1 C.c.Q et 1102.1 C.c.Q.);
un copropriétaire ou un administrateur pourra demander au tribunal d’annuler, ou même de modifier (ce qui est une nouveauté), une décision du conseil d’administration au plus tard dans les 90 jours de celle-ci, si cette décision est partiale ou a été prise dans l’intention de nuire aux copropriétaires ou au mépris de leurs droits. Cette modification s’harmonise avec l’actuel article 1103 C.c.Q., qui prévoit le droit de demander judiciairement la nullité d’une assemblée de copropriétaires, et dont le délai de déchéance pour exercer ce droit passe également de 60 à 90 jours (article 1086.2 C.c.Q.) ;
les administrateurs (1086.3 C.c.Q.) ou les copropriétaires (1103.1. C.c.Q.) empêchés de voter en l’absence de quorum suite à l’opposition ou l’empêchement systématique de certains d’entre eux, pourront dorénavant obtenir du tribunal des ordonnances appropriées. Ces nouveaux recours sont salutaires et permettront certainement de débloquer le fonctionnement des petites et moyennes copropriétés, notamment en raison des exigences du nombre de voix aux articles 1097 C.c.Q. et 1098 C.c.Q. ;
suite à un amendement adopté lors de l’étude du projet de loi, le copropriétaire qui doit trois mois de charges communes ne pourra pas être élu administrateur du syndicat (art. 1086 C.c.Q.). Cette mesure s’harmonise logiquement avec celle de l’article 1094 C.c.Q., qui interdit au copropriétaire ainsi endetté de voter aux assemblées de copropriétaires.
Entrée en vigueur
La plupart de ces nouvelles obligations sont entrées en vigueur le 10 janvier 2020. Les obligations du syndicat d’établir un carnet d’entretien de son immeuble ou d’obtenir une étude du fonds de prévoyance (articles 1070.2 et 1071 C.c.Q.), entreront en vigueur au moment de l’adoption par le gouvernement de règlements particuliers qui leur seront dédiés.
Pas de panique : le carnet d’entretien de l’immeuble et l’étude du fonds de prévoyance pourront être établis et obtenus par le syndicat au plus tard 3 années et un jour après l’adoption par le gouvernement des règlements leur étant dédiés (article 137 de la loi 16). Des équivalences seront aussi prévues pour les copropriétés qui sont déjà dotées d’un tel carnet d’entretien ou d’une étude de leur fonds de prévoyance.
Successivement depuis 2018, les projets de lois 141 et 16, ainsi que la modification subséquente de l’article 1074.2 C.c.Q. du projet de loi 41 dans le cadre de la réforme de l’assurance en copropriété, ont modifié le droit de la copropriété divise de manière marquée.
L’année 2020 a donc été une année importante pour les syndicats de copropriété, qui devront se préparer à la plupart de ces nouvelles obligations. C’est notamment le cas de la description des unités privatives (article 1070 C.c.Q.), prévue au projet de loi 141 pour déterminer “l’unité de référence” utile lors du partage des indemnités en cas de sinistre entre l’assureur de la copropriété et celui de l’unité privative sinistrée. Cette description devra être approuvée par l’assemblée des copropriétaires au plus tard le 13 juin 2020 pour les copropriétés qui existaient au 13 juin 2018.
Alors que le droit de la copropriété divise fête son cinquantenaire au Québec, les changements apportés par cette véritable révision législative doivent être bien compris et analysés afin de les appliquer de la bonne manière et au bon moment dans la gestion de votre copropriété : nous serons heureux de vous assister et en discuter ensemble.
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